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Rationalité environnementale

Quels sont les impacts des mégabassines sur les écosystèmes aquatiques et terrestres environnants ?

La construction d'une mégabassine se fait obligatoirement au détriment d'un milieu déjà existant. Que celui-ci soit une forêt, un champ ou une zone humide, le milieu sera réduit de la taille de la mégabassine et des structures environnantes, digues comprises. La mégabassine de Sainte Soline devrait avoir une emprise au sol de 16 hectares, l'équivalent de 20 fois la taille du terrain de foot du Stade de France, avec des digues de 8 mètres, soit la hauteur d'un immeuble de trois niveaux. La perte d'habitat pour la faune et la flore est inévitable, quel que soit le lieu de construction. La destruction du paysage est quant à elle liée à l'endroit où la mégabassine est implantée, mais inévitable dans le cadre du Marais Poitevin. Cette mégabassine doit être construite dans le Marais Poitevin, qui est la 2ème zone humide de France. Le Marais Poitevin possède le label Parc Naturel Français depuis 2014, après l'avoir perdu en 1996 à cause de son assèchement partiel au bénéfice des cultures céréalières (1). La construction de la mégabassine va donc encore réduire sa superficie, avec un risque lié de perte du label Parc Naturel Français et des retombées touristiques liées. En termes d'hydrologie, l'étude du BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) montre que le débit d'eau à l'entrée du Marais Poitevin devrait être réhaussé au printemps et en été (2). L'hydrogéologue Alain Dupuy estime que dans le cas spécifique du Marais Poitevin, "où nappes et rivières sont imbriquées, interconnectées", "prendre l'eau en abondance l'hiver et interdire tout prélèvement dans le milieu l'été devrait bénéficier aux zones humides, aux tourbières et aux marais" (3).

En termes de biodiversité, un rapport de l'Office Français de la Biodiversité (OFB) montre que 20 ans après l'édification d'une retenue d'eau, il y a toujours des modifications sur la biodiversité du cours d'eau concerné (4). La mégabassine ne fonctionne pas de la même façon que les retenues, mais la question de son impact sur la biodiversité se pose et il est impossible d'y répondre de façon formelle, aucune étude n'ayant été faite et surtout aucune étude ne peut réellement prévoir les impacts locaux.

La construction en elle-même va avoir plusieurs effets sur l'environnement. La première est une artificialisation des sols, qui devient imperméable, avec une impossibilité de l'eau de pluie de rejoindre les nappes au niveau de la mégabassine. La construction en elle-même va entraîner la fabrication de différents matériaux et leur transport sur place. La pollution due à la construction et aux matériaux utilisés n'est pas connue, les constructeurs n'ont donné aucune information sur les matériaux utilisés ou leur provenance. Néanmoins il doit être possible de les limiter en utilisant des matériaux durables et des techniques moins polluantes.

La mégabassine doit pomper de l'eau dans les nappes phréatiques en hiver, eau qui sera de nouveau pompée depuis la mégabassine vers les champs en été. Le fonctionnement de la mégabassine va donc consommer de l'énergie, plus que quand l'eau était directement pompée des nappes vers les champs. Cette énergie sera-t-elle fossile ? Utiliser de l'énergie renouvelable pourrait atténuer les effets négatifs de la mégabassine.

Les sécheresses sont de plus en plus nombreuses, le stockage de l'eau existe depuis longtemps pour pallier à ces épisodes estivaux, sous différentes formes (bassines, réserves collinaires, barrages, …). Ainsi, 2 à 3 fois le volume d'eau des rivières serait stocké dans le monde. Mais ces réserves ont un effet négatif sur les cours d'eau et les nappes d'après l'OFB, et leur efficacité est réduite en cas de sécheresse longue (4). L'objectif des mégabassines, en puisant dans les nappes l'hiver, est de réduire de 70% les prélèvements l'été, dans les nappes comme dans les cours d'eau, qui seraient ainsi protégés. Le BRGM estime ainsi que les cours d'eau auraient un débit augmenté de 6 à 40% (2), protégeant les espèces aquatiques. Les nappes phréatiques auraient un abaissement de leur niveau moindre l'été grâce aux mégabassines. Néanmoins, plusieurs questions se posent. L'eau sera stockée à l'air libre, et il y aurait une évaporation de 20 à 60% de l'eau selon Christian Amblard (5), ce qui n'a pas été pris en compte dans le rapport du BRGM. Et plus il fera chaud dans les années à venir, plus cette évaporation sera importante. De la même façon, pour pouvoir prélever de l'eau dans les nappes en hiver, il faut que les nappes puissent se recharger. Et malheureusement, 90% des réserves souterraines sont dégradées dans le Mellois en Poitou (6) dont fait partie Ste Soline. Pendant l'hiver 2022-2023, les nappes ont eu beaucoup de mal à se recharger partout en France et sont majoritairement en déficit hydrique. Dans ces conditions, qui sont amenées à se répéter, comment prélever de l'eau ? Des études prédisent déjà 2 hivers sur 10 sans possibilité de prélever dans la nappe pour remplir les mégabassines (7). Imperméabiliser le sol au-dessus de la nappe, prélever dans les cours d'eau adjacent l'hiver, va aussi limiter le ruissellement d'eau vers la nappe et son remplissage. Dans un avenir qui se réchauffe, la mégabassine est-elle une solution à long terme ou risque-t-elle de détruire complètement les écosystèmes adjacents en les asséchant ?

Lors d'épisodes de sécheresse, les agriculteurs qui puisaient dans les nappes phréatiques n'ont plus ce droit, par arrêté préfectoral, pour préserver la nature. La création des mégabassines est censée pallier à cette interdiction. Néanmoins, l'eau pompée ne va servir qu'à quelques agriculteurs utilisant cette eau pour de l'agriculture intensive, de maïs notamment destiné à l'alimentation animale de par le monde. Les autres agriculteurs vont continuer de pomper dans la nappe phréatique, tant qu'ils en ont le droit. Cette privatisation de l'eau par quelques agriculteurs pose des questions de partage de la richesse naturelle mais aussi du modèle de l'agriculture intensive. L'eau est-elle un bien commun, un aléa naturel, une ressource que l'on peut s'approprier ? Les avis divergent entre les agriculteurs et leurs syndicats. Cette agriculture intensive appauvrit les sols et les pollue par l'utilisation importante de pesticides. Elle n'est pas non plus adaptée au climat de demain, le maïs étant très demandeur en eau, une ressource à utiliser avec intelligence et précaution dans les années à venir, tant elle va manquer à certains endroits. La question des mégabassines doit donc aussi se faire poser la question de l'avenir de l'agriculture intensive.

Vous avez ci-dessous un visuel global de la rationalité sous forme de carte mentale. Pour pouvoir zoomer, regarder en détail les liens avec les autres rationalités et cliquer sur les références, suivez ce lien.

 

Références (à retrouver dans la partie référentiel documentaire) :

1.           Pichard, G. Les projets de méga-bassines, accusées d’assécher les rivières, alimentent la guerre de l’eau dans les campagnes. Basta! https://basta.media/mega-bassines-marais-poitevin-irrigation-riviere-assechee-agriculture-intensive-ZAD-FNSEA (2021).

2.           Abasq, L. Simulation du projet 2021 de réserves de substitution de la Coopérative de l’eau des Deux-Sèvres. 133 http://infoterre.brgm.fr/rapports/RC-71650-FR.pdf (2022).

3.           AFP. Dans le Marais poitevin, la crainte d’une ‘guerre de l’eau’. Sciences et Avenir https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/dans-le-marais-poitevin-la-crainte-d-une-guerre-de-l-eau_167192 (2022).

4.           Impact cumulé des retenues d’eau sur le milieu aquatique - Expertise scientifique collective. (Agence française pour la biodiversité, 2017).

5.           https://www.trtfrancais.com/actualites/controverse-autour-des-mega-bassines-en-france-les-arguments-pour-et-contre-12518643. Controverse autour des méga-bassines en France: les arguments pour et contre. Controverse autour des méga-bassines en France: les arguments pour et contre https://www.trtfrancais.com/actualites/controverse-autour-des-mega-bassines-en-france-les-arguments-pour-et-contre-12518643.

6.           Le Bloa, A. ENTRETIEN. Manifestation contre les bassines : « Les faits donnent raison aux opposants ». Ouest-France.fr https://www.ouest-france.fr/environnement/eau/entretien-manifestation-contre-les-bassines-les-faits-donnent-raison-aux-opposants-d8b2df56-cb29-11ed-a992-b037a0c34ab8 (2023).

7.           Turgy, M. Vienne : le nouveau rapport sur les bassines c’est ‘l’anéantissement du protocole du Clain’ pour les irrigants. ici, par France Bleu et France 3 https://www.francebleu.fr/infos/environnement/vienne-le-nouveau-rapport-sur-les-bassines-c-est-l-aneantissement-du-protocole-du-clain-pour-les-irrigants-3198169 (2023).

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